Millefeuille


Un grand merci à Jean-Paul pour la mise en page de cet article.


Superwolf


Vous avez pu télécharger Will Oldham faisant le guignol chez le rappeur Sage Francis il y a peu. Il nous revient ici en vieux bluesman posé. Le parallèle est peut-être hâtif mais Oldham donne de plus en plus l'impression de faire tout et surtout n'importe quoi dans ses projets annexes et de se ramollir considérablement sur ses propres disques "officiels". De votre appréciation du précédent Master & everyone dépendra le succès (ou pas) de ce Superwolf. Pour ma part, étant donné que je dois encore me décider entre "bon disque raté" et "album moyennement convaincant", autant dire que cette chronique ne préférera pas donner un avis définitif et une fois de plus botter en touche en se fendant d'un laconique "donnons à ce disque la chance de s'améliorer au fil des mois". Ceci dit, on peut quand même pointer du doigt l'âge d'Oldham, pas qu'il soit déjà un vieillard, quand bien même ce ne serait pas bien grave, mais on sent bien que les années se suivent sans qu'il puisse nous proposer quoi que ce soit d'aussi émouvant qu'à l'époque de Palace. On attendra donc encore un digne successeur à I see a darkness. Le texte de Paul Bowles joint au livret est d'ailleurs révélateur - brève traduction : "Si un segment de la population d'un pays occidental souhaite s'isoler dans le but de protester, la solution la plus efficace et la plus rapide est de remplacer l'alcool par le cannabis". Ce passage, mine de rien, pourrait bien nous évoquer Oldham lui même : on est désormais bien loin des fantômes trempés dans le whisky de There is no-one what will take care of you. On peut soupçonner Will le barbu de sourire béatement à l'écoute de ses productions, perdu dans un nuage de fumée. Bien évidemment, Superwolf n'est pas un mauvais disque, il contient même de très bons titres (My home is the sea, pour n'en citer qu'un) mais il a le tort d'être le bon disque d'un artiste dont on est en droit d'attendre beaucoup plus. L'association avec Matt Sweeney était comme par hasard beaucoup plus convaincante quand il s'agissait de réinventer les vieux titres de Bonnie 'Prince' Billy et de Palace sur scène. On passe de bons moments sur ce disque mais peu restent mémorables, d'ailleurs faut-il rester pantois devant Goat & ram ou bien en pleurer de dépit ? C'est indéniablement cet art du contre-pied qui fait défaut à Will Oldham depuis plusieurs années. Ceci dit, donnons à ce disque la chance de s'améliorer au fil des mois. Je vous avais prévenus !

Eric F. le 7 février 2005

BONNIE 'PRINCE' BILLY & MATT SWEENEY Superwolf (Domino/Pias)


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